Influences germaniques sur la syntaxe
Influences germaniques sur la syntaxe
Après avoir étudié les influences des anciennes langues germaniques sur l’ancien français dans les domaines de la phonologie et de la morphologie, il convient d’examiner ces mêmes influences sur la syntaxe. L’analyse qui suit détaille les faits syntaxiques communs aux anciennes langues germaniques et à l’ancien français
Le français, une langue latine germanisée ?
La question des influences germaniques sur la syntaxe de l’ancien français semble être celle qui provoque le plus de controverses entre les chercheurs, avec d'un côté les partisans d'une évolution parallèle des deux langues sans interférences ni influences et, d’un autre côté, les tenants d'une influence de la syntaxe germanique sur la langue française en formation. Ainsi, Wartburg écrit : « L'ancien français occupe une position tout à fait isolée pour la place du verbe dans la phrase. On sait que la même place est parvenue à s'imposer en allemand dans la proposition principale et qu'elle domine dès le vieux-haut-allemand, quoique le verbe puisse également s'y rencontrer en position initiale ou finale, précisément, du reste, comme dans la poésie en ancien français. » [1967:103].[1]
Wartburg relève également d'autres points de grammaire historique française au sujet desquels, selon lui, une influence germanique dans le processus d'élaboration ne peut être évacuée [1967:103-106] :
– la particularité d'exprimer le sujet se fait à la fois par la désinence verbale et par le pronom personnel dans les langues romanes sur le sol desquelles les implantations germaniques furent importantes ;
– la réduction de trois démonstratifs à deux est probablement due à l'influence des Germains (Francs, Lombards, Alamans) car ceux-ci ne possédaient qu'un système binaire (contrairement au système trinaire latin hic - ipse - ille) ;
– l’utilisation de l'adverbe introducteur si : « On est assurément frappé, en ancien français, par la fréquence des cas où, dans des phrases hypothétiques ou temporelles, la proposition principale est introduite par l'adverbe si (...), ce qui correspond précisément à l'emploi de l'allemand so. » ;
– l’utilisation du pronom on ; Wartburg estime que les langues germaniques sont probablement à l'origine de « l'emploi particulièrement fréquent que fait le français du pronom indéfini issu du latin homo », même si la formation même du mot est romane ;
– l’emploi de particules séparées : « Dans sa pénétrante étude intitulée L'effacement des adverbes de lieu, L. Foulet fait remonter, à juste titre semble-t-il, à une influence franque l'emploi si fréquent, en ancien français, d'expressions composées d'un adverbe du type de "jus", etc., et d'un verbe. ».
En dépit de toutes ces remarques, de nombreux chercheurs estiment que la syntaxe de l'ancienne langue française est, en de nombreux points, un quasi-calque de la syntaxe latine. Or, s’appuyant sur l’étude des plus anciens textes en français, notamment les Serments de Strasbourg, M. Banniard[2] souligne certes l'étroite parenté syntaxique entre l'ancien français et l’ancien haut allemand des Serments et les textes latins juridiques, mais il postule, pour expliquer ces similitudes, une volonté des scripteurs des Serments d’imiter le latin, langue de prestige et seul modèle de langue juridique dont disposaient ces rédacteurs ; il convenait en effet de donner un caractère solennel à ce texte, dont l’enjeu politique était de première importance.
Il nous semble donc nécessaire d'examiner les textes littéraires, car ceux-ci apparaissent dépourvus d'enjeux politiques. Cette étude permettra de mettre en lumière des faits syntaxiques similaires dans les deux langues et sans correspondants dans les autres langues latines.[3]
Dans les parties qui suivent, nous étudions les différents points grammaticaux qui montrent des structures similaires en ancien français et dans les anciennes langues germaniques.
Place du participe passé
Les similitudes syntaxiques entre l’ancien haut allemand et l’ancien français sont prononcées dans ce domaine ; on observe en effet une stricte correspondance avec la syntaxe de la phrase allemande, où, en proposition indépendante ou principale, le participe passé du verbe conjugué se trouve rejeté en fin de phrase. Prenons quelques exemples dans la poésie :
M'unt […] de lur sovent doné
Maintenu an e jurz e entr' els governé
Guernes de Pont-Sainte-Maxence, Vie de saint Thomas Becket, v.18 et 19 du satisfecit (vers 1175)
Jo sui vers Deu et vers toi mult mesfeite
Le Jeau d'Adam, v.563 (2e moitié du XIIe s.)
N'a pas grant vasselaige / Fait, s'ele m'a traï
Conon de Béthune, Chanson, v.25-26 (fin du XIIe s.)
On trouve également des exemples dans la prose :
Tant avoit le jour traveillé qu'il s'endormi
Le Conte de la Charrette (1221-1225)
Mes il n'i a nului trouvé
Le Conte de la Charrette (1221-1225)
Quelle gloire li donra renommée ? sera-elle donc de lorier couronnée ?
Christine de Pisan, Livre des faits et bonnes mœurs de Charles V (fin du XIVe s.)
Ce fait se rencontre fort avant dans le temps puisqu'on peut lire, dans La Farce de Maître Pathelin (vers 1460) :
Car j'ay a luy parlé, sans faulte (v.597)
Il ne m'a pas pour bien gabbé (v.1014)
Le participe passé est cependant positionné avant son complément si celui-ci présente une certaine longueur :
La fu trové li plus des haltes dames del monde qui estoient fuies el chastel
Geoffroy de Villehardouin, La Conquête de Constantinople, par.249 (vers 1207)
La tendance semble s'inverser à partir de la fin du XIIe siècle, le participe passé se positionnant plus fréquemment en avant-dernière place, avant le complément :
M'unt fet mult grant sucurs
Guernes de Pont-Sainte-Maxence, Vie de saint Thomas Becket, v.18 du satisfecit (vers 1175)
Se li fu renduz salves les vies a cels qui dedenz estoient
Geoffroy de Villehardouin, La Conquête de Constantinople, par.249 (vers 1207)
Place de l'infinitif
Propositions à auxiliaire de mode
La place de l'infinitif est elle aussi la même dans les deux langues, qui le positionnent en fin de proposition dans le cas d'une proposition indépendante ou principale, tout particulièrement dans les propositions à verbe modal ou dans celles qui complètent le verbe faire. Cette construction traverse tout le Moyen Âge, de La Cantilène de sainte Eulalie (vers 880) à des œuvres datant du XVe siècle. Citons quelques exemples représentatifs de cette tournure courante dans la langue médiévale :
Uoldrent la faire diaule seruir
Cantilène de Sainte Eulalie, v.4 (vers 880)
Ne volst li enfes sum pere currucier
Vie de saint Alexis (vers 1050)
Asoldrai vos pur voz anmes guarir
Chanson de Roland, v.1133 (1080)
Grimberz va son message faire
Le Roman de Renart (XIIe s.)
Je ne puis au mostier venir
Ne le servise Dieu oïr
Se ge peüsse a gent parler,
Ne en aucun deduit aler
Marie de France, Lai d'Yonet, v.79-82 (vers 1160)
Ensi porrons aler au bois / arbres trenchier e prendre a chois
Wace, Le Roman de Rou, v.889-890 (1160-1170)
Diex se lessa en crois por nos pener
Thibaut de Champagne, Chanson de croisade (vers 1235-1239)
Qui peut face a face / La ses amours veoir
Christine de Pisan, Le Dit de Poissy, v.196-197 (1400)
Cette formulation n'apparaît pas comme ressortissant uniquement à la langue poétique, puisque nous avons des exemples tirés de textes en prose :
Chascuns garni le chastel qui li fu renduz de sa gent et fist le tresor garder
Geoffroy de Villehardouin, La Conquête de Constantinople, par.250 (vers 1207)
Si les mist on a chel avoir warder
Robert de Clari, La Conquête de Constantinople, chap. LXXXI (avant 1206)
pource que je doi avoir honte de tous preudomes veoir
Le Conte de la Charrette (1221-1225)
Cil vaillant bacheler [...] qui sagement vuelent à Dieu aler
Thibaut de Champagne, Chanson de croisade (1235-1239)
Certes il n'i eut adonc en le place signeur [...] qui peuist en grant pièce parler
Froissart, Chroniques (fin XIVe s.)
Cette construction dure plusieurs siècles, puisque nous lisons, dans La Farce de Maître Pathelin (vers 1460) :
Se je vueil mon sens esprouver (v.35)
Quand je veulx mon sens applicquer (v.1130)
Il cuide a son propos venir (v.1268)
La littérature allemande de la même époque présente des phrases à structure similaire :
Got sende si zesammne, die gerne geliep wellen sin
« que Dieu unisse ceux qui veulent être amants »[4]
Cependant, on rencontre également des cas où le verbe à l'infinitif n'occupe pas la dernière place de la proposition, notamment dans la poésie, où des impératifs de versification peuvent expliquer cette position :
A czo no's uoldret concreidre li rex pagiens
Eulalie, v.21 (vers 880)
Ne pot intrer en la ciutat
Saint Léger, XXIV (début du XIe s.)
Ce dist li pere filz kar te uai culchier / auoc tespuse al cumant deu del ciel
Vie de saint Alexis (vers 1050)
Sin deit hom perdre del sanc e de la char
Chanson de Roland, v.1119 (1080)
Ne puis ge donc haïr ma vie ?
Eneas, v.1978 (vers 1160)
Cette construction a presque totalement disparu en français moderne. Il n'en reste plus que quelques rares traces, dans des formules figées comme Il faut raison garder.
Propositions complétives de but
Cette structure est également présente dans les propositions de but d'ancien français, comme elle est encore la norme en allemand moderne. On la rencontre dans les textes poétiques :
asoldrai vos pur voz anmes guarir
Le Roman de Roland, v.1133 (1080)
Cette structure est également présente dans des textes en prose, et à une date relativement tardive :
ces honestes bourgois, qui de lor propre volenté se sont mis en vostre merci pour les aultres sauver
Froissart, Chroniques (fin du XIVe s.)
Place du verbe conjugué
Propositions principales
Rappelons que, dans les propositions principales d'ancien français, un adverbe ou un complément placé à la tête d’une phrase (complément d'objet ou de phrase) entraîne le rejet du sujet après le verbe qui occupe une place centrale dans la phrase, la deuxième position [Foulet 1928:308]. Tout comme en allemand, ni les conjonctions de coordination, ni les conjonction de subordination, n'entrent dans le décompte des segments de phrase. Nous ne donnerons que quelques exemples, tant cette construction syntaxique est commune en ancien français :
Pur nostre rei devum nus ben murir
Chanson de Roland, v.1128 (1080)
Ja te seroient tuit li menbre tranchié
Raoul de Cambrai, v.1701 (fin du XIIe s.)
Cele nuit ot il bien negié / Que mult froide estoit la contree
Chrestien de Troyes, Perceval, v.4162-4163 (vers 1180)
Ajoutons que les deux langues présentent un autre trait syntaxique commun, en ce qu'elles commencent volontiers leurs propositions principales par un embrayeur bref, or ou car en ancien français, do, nu, da, etc., en ancien haut allemand.
L'ancien haut allemand connaît également cette construction en ce qui concerne le verbe conjugué en proposition principale : le premier élément de la phrase est le sujet, nom ou pronom, un complément ou un adverbe [Jolivet-Mossé 1947:205] :
vor einer vesperzite huop sich gross ungemach[5]
« au début d'une soirée s'éleva un grand tumulte »
Des textes de la fin du Moyen Âge contiennent eux aussi ce genre de construction ; on peut citer les Mémoires de Philippe de Commynes, ce qui est d'autant plus intéressant qu'il s'agit là de prose, et non de poésie :
Pour lors avoit envoyé le roy devers l'empereur Jean Tiercelin
Avec ceste fable paya l'empereur nostre roy
Philippe de Commynes, Mémoires (fin du XVe s.)
Mais même les textes en vers, à date avancée, présentent cette tournure syntaxique, notamment dans La Farce de Maître Pathelin :
Parmi le col soy je pendu / s'il n'est blanc comme ung sac de plastre (v.366-367)
Et la recevray je pecune (v.503)
Encor ay je denier et maille (v.216)
Au mains viendriez vous assaier / quel vin je boy (v.322-323)
Ce genre de tournure, dans laquelle la proposition s'ouvre par un adverbe de concession, n'a pas disparu du français moderne :
Il n'a pas réussi, mais au moins pourra-t-il dire qu'il a tout tenté. [6]
Propositions subordonnées
Dans les propositions subordonnées, qu’elles soient hypothétiques, temporelles ou conditionnelles, les deux langues présentent le verbe conjugué à la fin de la phrase :
e cume la nef porter en pout
Voyage de saint Brendan, v.180 (vers 1120)
li brachet, qui la rote sut, / Quant son seignor vit et connut,
Beroul, Roman de Tristan, v.1541-1542 (fin du XIIe s.)
Se je avoie le brun elme lacié
Raoul de Cambrai, v.1706 (fin du XIIe s.)
On observe néanmoins que la proposition subordonnée de conséquence présente toujours le schéma que – sujet – verbe :
La refu li tresor si tres granz trovez que il n'en met mie mains
Geoffroy de Villehardouin, La Conquête de Constantinople, par.250 (vers 1207)
Tant i avoit de rike vaisselemente d'or [...] que ch'estoit une fine merveille
Robert de Clari, La Conquête de Constantinople, chap. LXXXI (avant 1206)
Propositions relatives
Dans les propositions relatives, en ancien français comme en allemand, le verbe conjugué est de manière quasi systématique placé à la fin de la phrase.[7] Cette construction, qui est présente durant tout le Moyen Âge, n'offre que de très rares exceptions.[8] Les segments de la phrase s'organisent selon le schéma suivant : pronom relatif – sujet – complément(s) – verbe conjugué :
[qu'il n'est bastars] c'il n'a Dieu renoié
Raoul de Cambrai, v.1709
qui tal exercite vidist
Saint Léger, XXIV (début XIe s.)
Li empere, ki Franceis nos laisat,
Chanson de Roland, v.1114 (1080)
Ma bone espee, que li reis me dunat
Chanson de Roland, v.1121 (1080)
Que trestuit li autre a lui soient
Chrestien de Troyes, Erec et Enide, v.5500 (vers 1168)
Qui a cest jalos me donnerent
Et a son cors me marierent !
Marie de France, Lai d'Yonet, v.87-88 (vers 1160)
Li brachet, qui la rote sut,
Quant son seignor vit et connut,
Beroul, Roman de Tristan, v.1541-1542 (fin XIIe s.)
Jusqu'à la fin du Moyen Âge, cette tournure reste fréquente dans les textes en vers, même à une date avancée :
Par l'ame qui en moy repose
La Farce de Maître Pathelin, v.478 (vers1460)
Les textes en prose présentent également cette structure, que l’on peut donc considérer comme étant alors profondément enracinée dans la langue, dans la mesure où la prose n’est pas soumise à des contraintes semblables à celles que l’on rencontre dans la versification. De plus, la position dernière occupée par le verbe conjugué de la proposition relative se rencontre dans des textes relativement tardifs, et il serait douteux que cette position ne fît pas partie de longue date de la langue courante. Nous avons relevé les quelques exemples suivants :
Se li fu renduz salves les vies a cels qui dedenz estoient
Geoffroy de Villehardouin, La Conquête de Constantinople, par.249 (v. 1207)
Apres si kemanda on que [...] a une abeie qui en le cité estoit
Robert de Clari, La Conquête de Constantinople, chap. LXXXI (avant 1206)
Lancelot saut sus et met la main a l'espee qui a son chevés estoit
Le Conte de la Charrette (1221-1225)
lors vient mesires Gavains qui levez fu
Le Conte de la Charrette (1221-1225)
Les vapeurs et les buees qui en l'air montent sont coulourees de diverses couleurs
Mahieu Le Vilain, Les Méthéores d'Aristote (avant 1260)
Estraignant à grant paine les lermes qui ma veue troublent
Christine de Pisan, Livre des faits et bonnes mœurs de Charles V (fin XIVe s.)
Il est remarquable que la prose de la fin du XVe siècle fût encore témoin d'une tournure syntaxique présente depuis environ cinq siècles, puisqu'on peut lire, chez Molinet :
Rabota et essarta les malvais neudz et zizanieux plantages qui la clarté de l'ostel empeschoyent
Jean Molinet, Chroniques (après 1474)
Mais on la rencontre encore plus tardivement, toujours dans certains textes en prose, notamment chez Rabelais :
Par le plaisir de luy qui tout regist et modere
Rabelais, Pantagruel, II, 8 (1532)
Les exceptions semblent ne concerner que les propositions relatives à compléments longs, que ceux-ci soient compléments d'objet direct ou complément d’objet indirect : le verbe conjugué passe alors de la dernière à l'avant-dernière place afin, semble-t-il, de se rapprocher du sujet :
[qu'elle Deo raneiet] chi maent sus en ciel
Séquence de sainte Eulalie, v.6 (vers 880)
Ki nus reeinst de sun sanc preciuz
Vie de saint Alexis (1050)
Que s'en ralgent in lor honors
(...) Quae s'en ralat en s'evesquet
Saint Léger, XXI (début XIe s.)
Que plus ad chier que tute rien terrestre
Vie de saint Alexis (1050)
Puis errache la piece qui estoit en terre fichiee
Le Conte de la Charrette (env. 1221-1225)
Princes, le plant qui bon fruit portera / De viel estoc
Eustache Deschamps, Balade
La fu trové li plus des haltes dames del monde qui estoient fuies el chastel
Geoffroy de Villehardouin, La Conquête de Constantinople, par.249 (vers 1207)
L'ancien haut allemand présente une structure identique : le verbe conjugué de la proposition relative ou de la subordonnée occupe généralement la dernière place, sauf s'il est accompagné d'un ou de plusieurs compléments importants : en effet, Il arrive souvent que certains éléments de la proposition subordonnée soient rejetés après le verbe ; ceci se produit surtout dans les phrases longues chargées d'éléments lourds, mais on en trouve aussi des exemples dans les phrases brèves :
riet mir min unwiser muot, dass ich goss uf den stein [9]
« ma folie me conseilla de verser de l'eau sur la pierre »
Propositions impératives
L'impératif est rarement traité dans les grammaires historiques. Or, nous trouvons dans quelques textes les formes suivantes :
dormez-vous
Le Conte de la Charrette (1221-1225)
vous soyez le bien venu, sire
La Farce de Maître Pathelin, v.1217 (vers 1460)
La première de ces formes apparaît comme un calque parfait de l'allemand schlafen Sie[10], la seconde, bien qu'elle ne présente pas l'inversion du verbe et du sujet, contient néanmoins le pronom sujet du verbe. Aucune ascendance latine ne peut être invoquée pour expliquer la forme de ces impératifs, puisque le latin construisait ce mode à l'aide des seules désinences verbales.
Particules verbales séparées
L'étude que nous conduisons ci-dessous s'appuie en partie sur le texte de Claude Buridant, déjà cité[11], texte dont le thème principal concerne l'étude de ce qu'il est convenu d'appeler les particules séparées d'ancien français. À partir de cette étude, nous avons élargi le champ de l'étude en comparant l'ancien français et l'ancien haut allemand[12].
Place de la particule verbale séparée dans la phrase
L'ancien français développa un système de particules séparées qui ressemble au système allemand. Notons les faits suivants, qui concernent la place des particules séparées relativement à la place du verbe :
– avec les formes conjuguées, la particule se place généralement après le verbe ;
– avec infinitif ou participe, la particule se place généralement avant cet élément, « dans l'immense majorité des cas », pour citer Buridant. Les exemples suivants, tirés sauf mention contraire de cette étude, mettent en évidence le parallélisme de la construction entre les deux langues :
je ne puis mes avant aller (Le Roman de Renart) (ich kann nicht mehr weiter gehen)
encor parla la dame avant (Vie du pape saint Grégoire) (nochmal sprach die Dame weiter)
La construction est rigoureusement semblable en allemand, comme le montrent nos traductions. De plus, et Buridant en convient, ces formes verbales, infinitif ou participe, sont très souvent situées à la fin de la proposition, tout comme en allemand.
Rôle sémantique des particules verbales séparées
Dans les deux derniers exemples, avant est une des nombreuses particules séparées avec lesquelles l'ancien français précisait le sens de certains verbes à sémantisme imprécis comme aller ou venir (verbes « sans couleur » ou « farblose Verbe » pour reprendre la terminologie allemande) dont le sens absolu pouvait être modulé par ces particules. Si nous considérons de nouveau l'un des exemples que nous venons de citer, nous pouvons observer la structure syntaxique et sémantique suivante :
je ne puis mes avant aller (Le roman de Renart ) (ich kann nicht mehr fortgehen)
Ici, avant complète le sémantisme vague et indéfini de aler, lui donnant le sens de « progresser », tout comme la particule fort précise le sens de gehen « aller ».
Nous avons recueilli d'autres exemples dans la littérature, notamment dans la prose, ce qui nous semble être l'indice d'une structure syntaxique inhérente à la langue et dégagée des contraintes formelles, phoniques ou rythmiques imposées par la poésie :
Tristan estoit el bois aval
Beroul, Tristan, v.1531 (entre 1160 et 1200)
Lors descent une lance parmi le feste de la maison contreval
Le Conte de la Charrette (1221-1225)
Elle vint contreval bruiant
Le Conte de la Charrette (1221-1225)
La particule, employée avec un verbe de mouvement indéterminé, précise donc la direction du déplacement, comme dans venir avant, arriere. Buridant cite d'ailleurs R.L. Wagner pour lequel, dans certains cas, arriere, doublant le préfixe -re, a le sens de l'allemand zurück.
Rôle aspectuel des particules verbales
Les particules séparées d'ancien français avaient également un rôle aspectuel ; selon Buridant, elles pouvaient en effet, lorsqu'elles étaient employées avec des verbes autres que des verbes de mouvement, exprimer différents aspects du procès. Ainsi, l'aspect perfectif pouvait être rendu par une particule. Dans l'exemple suivant, cité par Buridant, c'est l'idée d'achèvement que la particule traduit : mangier fors. Or, cette construction se rencontre en allemand, où le verbe aus-essen a les mêmes sens : « tout manger » ou « achever de manger ».
Également dans ce domaine des particules séparées d'ancien français, les chercheurs sont en désaccord ; si certains seraient en faveur de l'influence germanique, une majorité d'entre eux nient cette influence. Cependant, Buridant note dans sa communication qu'aucune autre langue romane ne présente ou n'a présenté des exemples de particules séparées, sinon l'italien du Nord et le toscan[13]. Or, ces régions furent à date ancienne des terres de conquête germanique, avec la présence des Longobards, et sont de longue date limitrophes des régions germanophones de la Suisse et de l'Autriche. Dans les langues et dialectes latins méridionaux, cette construction est inconnue. L'influence germanique sur l’utilisation des particules séparées en ancien français serait donc une hypothèse recevable.
Particules verbales séparées et redondance
Par ailleurs, dans l'introduction de sa communication, Buridant fait observer que, dès le latin, on rencontre des formes comme ascendere sursum, où sursum est redondant et, ceci, vraisemblablement dans la langue parlée. Dans sa conclusion, l'auteur évoque le trait populaire du français moderne qui consiste à utiliser un adverbe redondant avec le sémantisme du verbe auquel il est joint : monte en haut, descends en bas. On trouve en effet, en ancien français, des exemples d'utilisation redondante de particules séparées :
Puis ist fors de la chambre sun pere
Vie de saint Alexis (environ 1050)
La nef fu prest u il dut enz entrer
Vie de saint Alexis (environ 1050)
Dist as freres : "Entrez enenz (...)"
Voyage de saint Brendan, v.185 (environ 1120)
Cette formulation se rencontre même au XVIe siècle, par exemple chez Rabelais :
À son entrée, tout le monde sortit hors pour le veoir
Pantagruel, II, 7 (1532)
En français moderne, on peut entendre couramment, comme le souligne Buridant, « Je descends en bas » ou « Je monte en haut ». Une méconnaissance de la grammaire ne nous paraît pas une explication suffisante pour ce type de formulation qui reste une faute de grammaire, car des locuteurs lettrés peuvent également l'employer. Peut-être la précision supplémentaire, même redondante, apportée par l'utilisation de l'adverbe de lieu est-elle ressentie comme nécessaire pour renforcer l'information, particulièrement pour la phrase « Je monte en haut », où la brièveté du verbe peut donner au locuteur l'impression de transmettre une information insuffisante[14]. Par ailleurs, le fait que ces tournures se rencontrent jusque dans les plus anciens textes conservés nous fait supposer qu'il ne faut pas y voir uniquement une inattention du locuteur ou une méconnaissance de la langue, mais plutôt une survivance de l'ancien français qui utilisait couramment ces adverbes de lieu, afin de renforcer l'information sémantique déjà fournie par le verbe.
Participe présent avec rôle de particule verbale
Le participe présent a parfois une valeur de particule, dans la mesure où il complète le sémantisme du verbe conjugué :
A foc, a flamma uai ardant, / et a gladies percutan
Saint Léger, XXIII (début XIe s.)
Puis uint curant dreitement a la mer
Vie de saint Alexis (environ 1050)
Cette utilisation du participe présent perdure pendant plusieurs siècles, puisque on peut lire, dans La Farce de Maître Pathelin (environ 1460) (vers 733-734) :
Ne scay quoy qu'i va flageolant :
Il s'en va si fort grumelant
Dans tous ces exemples, le participe présent agit comme une particule qui précise un verbe de mouvement au sémantisme particulièrement large, aller ou venir en général.
Particules verbales et verbes modaux
Dans sa communication, Buridant évoque la possibilité pour la seule particule séparée d'ancien français d'indiquer le mouvement lorsqu'elle accompagne le verbe pooir. Comparons un exemple en ancien français et notre traduction en allemand :
il ne peult hors[15]
er kann nicht aus
Dans l'exemple d'ancien français, le verbe, issir ou aller, est sous-entendu, tout comme le verbe gehen dans l'équivalent allemand. Buridant cite d'ailleurs un seul exemple dans une autre langue latine présentant une construction similaire, un exemple en italien, tiré de Boccace.
La plupart de ces constructions n'ont presque pas survécu en moyen français (voir notre exemple tiré de Rabelais, cité plus haut), ni a fortiori en français moderne. Nous posons l'hypothèse qu'elles se sont maintenues pendant plusieurs siècles en raison du bilinguisme de la population, bilinguisme qui entretenait, dans une certaine mesure, l'utilisation de ces constructions syntaxiques.
Particules verbales et prépositions-préverbes
A. Rouseau [1995:205-213] évoque quant à lui la question des prépositions-adverbes, issues de la disjonction d'un groupe prépositionnel, et donne l'exemple suivant :
il court après lui > il lui court après.
L'auteur écrit ensuite [1995:206] : « ces tournures, souvent jugées familières ou vulgaires, sont extrêmement importantes car le modèle syntaxique sous-jacent est dans le droit fil de constructions bien connues en allemand ». L'exemple ci-dessous, également indiqué par Rousseau, nous semble éclairant :
er läuft ihm nach > il lui court après.
Pour Rousseau, la parenté typologique entre les deux constructions est incontestable, bien qu'il avance la restriction suivante : « Toutefois, ces constructions restent très différentes de celles rencontrées en allemand : elles utilisent certes le même schéma syntaxique, mais sont limitées aux cas où l'objet est un déictique ou un anaphorique et peut occuper, de ce fait, une position seconde dans l'énoncé. » [Rousseau 1995-208].
De plus, ajoute l'auteur, « ces ellipses ne sont généralement possibles qu'à la finale et non à l'initiale d'un énoncé : *sans je ne peux lire ». Et, un peu plus loin : « Ce trait de position a son importance : il indique que ces prépositions isolées sont devenues proches de véritables préverbes ou plus exactement de postverbes (comme en anglais), car elles figurent dans la zone du prédicat. »
La conclusion de Rousseau sur ce thème nous semble néanmoins mériter une certaine prise en considération : « il est sûr que le français possède, comme l'allemand, des préverbes affectés à la dérivation. » Il conviendrait donc d'approfondir, dans ce domaine comme dans d'autres, la comparaison entre les deux langues.
Autres faits syntaxiques
On et homme
Un autre fait qu’il convient d’examiner est illustré dans plusieurs textes littéraires médiévaux et jusqu'à une époque assez tardive. Parallèlement au pronom français on, qui provient, tout comme homme, du latin homo, l'allemand possède le pronom man « on », qui dérive du nom Mann « homme ». Nous avons trouvé, dans la littérature, plusieurs exemples dans lesquels homme est utilisé avec la valeur de l'indéfini :
– dans les Serments de Strasbourg (842) :
si cum om per dreit son fradra salvar dift
– deux siècles et demi plus tard, dans La Chanson de Roland (1080) :
pur sun seignur deit hom susfrir granz mals (v.1117)
sin deit hom perdre del sanc e de la char (v.1119)
– dans Le Jouvencel de Jean de Bueil, texte rédigé entre 1463 et 1466 :
ung bon troppeau de gens d'armes pour garder que homme ne reculle
Il semble difficile de supposer que ces occurrences de homme ne représentent pas le pronom indéfini. En effet, dans le texte de Jean de Bueil, nous aurions dû trouver *pour garder que nului ne reculle. On notera qu’il n'existe pas d'équivalent de on dans les autres langues romanes voisines du français, l’espagnol et l’italien, si ce n'est dans certains dialectes de l'italien, comme le fait remarquer Pfister : « On trouve, dans des dialectes du nord de l'Italie, un pronom impersonnel semblable à ceux qu'ont l'allemand et le français » [Pfister:1984-68]. L'italien standard, lui, ignore cette construction.
Mais et ainz
L'ancien français connaissait un système de double conjonction de coordination négative, mais et ainz « mais au contraire », utilisées selon que la proposition précédente était affirmative ou négative. Le rapprochement avec la grammaire allemande, qui connaît une opposition similaire avec les conjonctions aber et sondern, s'impose[16]. L'utilisation de ainz après proposition négative se rencontre dans tous les textes de l'ancienne langue, comme dans cet exemple :
Sachiez, [...] / Que je n'en reprenderai mie, / Ainz l'avera ma douce amie
Jean Renart, Le Lai de l'Ombre, v.884-886 (1222)
Il est néanmoins remarquable de rencontrer ainz dans un texte du XVIe siècle, de Rabelais en l'occurrence :
Je ne me reputeray totalement mourir, ainz passer d'un lieu en aultre
Pantagruel, II, 8 (1532)
Conclusion
Pour faire un bilan rapide de cette partie, nous noterons que l'ancien français est parcouru de traits grammaticaux similaires à ceux de l'allemand. Il est également à remarquer que certaines de ces constructions syntaxiques perdurèrent jusqu'au XVIe siècle, dans la prose et dans la poésie. Or, la coupure semble se produire durant ce même siècle ; ce que nous pourrions appeler une dégermanisation de l'ancienne langue se produisit alors, notamment dans la littérature. Nous reviendrons dans des articles ultérieurs sur les raisons de ce changement ; nous ne pouvons que constater que l'ancien français, relativement à certains aspects de sa syntaxe, semble se situer à la croisée de l’ancien haut allemand et du latin, même si, à partir du XVIe siècle, la plupart de ces constructions d'ancien français sont devenues agrammaticales, comme la place particulière de l'infinitif et du participe dans la phrase ou le rôle sémantique des particules séparées.
Il reste néanmoins à étudier le lexique général de la langue ; en effet, si plusieurs centaines de mots d'origine germanique ne survécurent pas à la fin du Moyen Âge, comme nous le verrons dans les articles à venir, un fort contingent de ces mots est encore présent en français moderne.
Bibliographie
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- Anonyme, La Farce de maître Pierre Pathelin, Paris, Garnier-Flammarion, édition de Jean Dufournet, 1986.
- Anonyme, Le Roman de Renart, volumes I et II, Paris, Garnier-Flammarion, édition de Jean Dufournet et Andrée Méline, 1985.
- Banniard M. (2003), « Latinophones, romanophones, germanophones : interactions identitaires et construction langagière (VIIIe - Xe s.) », contribution à la journée d'études de Médiévales, 8 novembre 2002, Médiévales, 45 (en ligne).
- Banniard M. (éd.) (1997), Langages et peuples d'Europe. Cristallisation des identités romanes et germaniques (VIIe - XIe s.). Actes du colloque international organisé par le Centre Européen d'Art et Civilisation médiévale de Conques et l'Université de Toulouse-Le Mirail (Toulouse-Conques), CNRS-Université de Toulouse-Le Mirail, UMR 5136.
- Brunot F., Bruneau Ch. (1964, 3e éd.), Précis de grammaire historique de la langue française, Paris, Masson.
- Buridant C. (2000), Grammaire nouvelle de l'ancien français, Paris, SEDES.
- Duden Etymologie. Herkunftswörterbuch der deutschen Sprache (1963), Bibliographisches Institut, Mannheim, Dudenverlag.
- Foulet L. (1928, 3e éd.), Petite syntaxe de l'ancien français, Paris, Champion.
- France (Marie de), Lais, Paris, Folio, édition de Philippe Walter, 2000.
- Jolivet A., Mossé F. (1947, 1e éd. 1941), Manuel de l'allemand du Moyen Âge (des origines au XIVe siècle), Paris, Aubier.
- Kluge (24e éd. 2002, revue et augmentée, 1e éd. 1883), Etymologisches Wörterbuch der deutschen Sprache, Berlin, Walter de Gruyter.
- Rabelais, Gargantua, Paris, Garnier-Flammarion, édition de Françoise Joukovsky, 1993.
- Rabelais, Pantagruel, Paris, Garnier-Flammarion, édition de Françoise Joukovsky, 1993.
- Rousseau A. (sous la direction de) (1995), Les préverbes dans les langues d'Europe. Introduction à l'étude de la préverbation, Lille, Presses Universitaires du Septentrion.
- Wagner R.L. (1949), Textes d'étude (ancien et moyen français), Genève, Droz.
[1] Chaurand remarque également la place centrale du verbe dans la phrase d'ancien français, sans faire toutefois de commentaire particulier sur ce sujet [Chaurand 1999:51].
[2] M. Banniard [2003].
[3] Nous garderons néanmoins toujours en mémoire le fait que l'ancienne langue poétique n'est peut-être pas un témoin infaillible de la langue parlée. Aussi avons-nous fait des recherches dans de nombreux textes en prose qui, tout en étant incontestablement de véritables textes littéraires, ne sont pas soumis aux contraintes rythmiques de la poésie, lesquelles contraintes peuvent être à l'origine de formulations syntaxiques différentes de celles de la langue parlée.
[4] Poésies du sire de Kürenberg (vers 1170) [Jolivet-Mossé 1947:207]
[5] Nibelungenlied (vers 1210) (cité par Jolivet-Mossé 1947-205).
[6] André Rousseau fait également remarquer une similitude de constructions entre français et allemand, notamment en ce qui concerne les particules séparées, tout en soulignant que la ressemblance s'arrête au fait que le français ne permet ce type de formulation uniquement dans le cas où l'objet est un déictique ou un anaphorique. Il y a là, selon nous, une similitude bornée par la catégorie grammaticale du sujet (« À propos des préverbes du français. Pour une méthodologie d'approche syntaxique », in Les préverbes dans les langues d'Europe, sous la direction de A. Rousseau, 1995, p.208).
[7] Dans le cas d'un temps composé, c'est le participe passé qui occupe cette place finale de la proposition.
[8] Selon Buridant [2000:747 sq.], l'ordre S-X-V est présent lorsque l'information apportée par X (complément) est mineure ou déjà connue ; en revanche, l'ordre S-V-X prévaudrait dans le cas où une information nouvelle est fournie par le complément.
[9] Hartmann von Aue, Iwein (fin du XIIe s.) (cité par Jolivet-Mossé 1947:206)
[10] Pour Buridant [2000:310], l'insertion du pronom personnel désignant l'allocutaire dans une phrase à l'impératif est seulement une marque d' « expressivité renforcée ». Il serait judicieux d'effectuer une étude systématique des occurrences de cette formulation en ancien français afin de vérifier si l'on trouve régulièrement cette volonté d'expressivité.
[11] Romanistique-Germanistique : une confrontation, Actes du colloque de Strasbourg, 1984, C. Buridant éd., pp.167 sqq.
[12] L'ouvrage de référence, en ce qui concerne la grammaire de l'ancien haut allemand, reste celui de A. Jolivet et F. Mossé, Manuel de l'allemand du Moyen Âge (des origines au XIV° siècle), Paris, Aubier (édition de 1947, première édition en 1941).
[13] Voir néanmoins la note 7 où, parlant de « coloration germanique » donnée à l'ancien français par l'utilisation des particules séparées, l'auteur nie une authentique influence germanique. Buridant évoque cependant Foulet, pour lequel l'influence germanique en ce domaine était une hypothèse tout à fait recevable.
Malgré tout, dans Les préverbes dans les langues d'Europe, Buridant affirme : « La concurrence faite aux préverbes par les particules séparées s'intègre dans l'ensemble des caractéristiques dites "germaniques" de l'ancien français, qui touchent aussi bien la morphologie que la syntaxe. À mesure de l'évolution de la langue, marquée par une latinisation croissante qui favorise les formations savantes synthétiques (circon-, super-), cette concurrence diminuera, et s'éliminera progressivement la palette des emplois comme particules, jusqu'à l'élimination des particules séparées » [Rousseau 1995:321].
[14] Nous savons que les verbes brefs ont été souvent éliminés par la langue, comme ouïr, remplacé par entendre.
[15] Mistere de Saint Quentin, cité par Buridant.
[16] Ce rapprochement est d'ailleurs noté par plusieurs auteurs, parmi lesquels J. Allières [1988:94] et Brunot-Bruneau [1964:421]. Notons également qu'une opposition similaire existe en espagnol [Buridant:2000-561].