Françoise NORE

Françoise NORE

Pollution


Pollution

En des temps très anciens, au XIIe siècle plus précisément, le nom pollution désignait la souillure ou la salissure en général. Puis pollution se spécialisa, si l'on peut dire, pour nommer au XVIIe siècle la profanation d'un objet ou d'une construction d'ordre religieux. Toutefois, au XIVe siècle, pollution avait légèrement bifurqué et pris également deux autres sens, ceux de "masturbation" et d'"émission involontaire de sperme". Utiliser aujourd'hui pollution avec l'un de ces quatre sens anciens relève bien sûr d'un usage littéraire, sinon vieilli car, de nos jours, pollution nomme uniquement la "souillure d'un élément naturel par des agents toxiques". Remarquons que cette signification nouvelle de pollution est relevée, pour la première fois, dans le Journal Officiel du 20 novembre 1874, à l'intérieur d'un article intitulé Pollution des eaux de la Seine, ce qui ne s'invente pas. On conclut de ce qui précède que nos aïeux du début de la Troisième République ne devaient pas, eux non plus, se baigner souvent dans la Sequana, celle-là même qui vit Jules César triompher de notre ancêtre le Gaulois Camulogène.

 

Or, aujourd'hui, ce n'est point de la Seine qu’il est question lorsqu'on parle de pollution dans les médias, mais bel et bien de l'air, et tout particulièrement de celui de la ville capitale. Taper pollution dans un moteur de recherche connu de chacun donne, comme tout premier résultat, "pollution Paris". Ce qui n'est guère flatteur pour les Lutéciens mais assez proche de la réalité. Quoi qu'il en soit, on peut s'interroger : s'il est prouvé qu'un anticyclone rebelle refuse de faire son travail, on ne peut ignorer que les activités humaines ont leur part de responsabilité dans la dégradation des éléments naturels. Et il faut donc expliquer la présence de ce couvercle de polluants posé sur Paris. Certains évoquent le chauffage au bois – il est vrai que, chaque soir, des dizaines de milliers de Parisiens regagnent leurs pénates avec, dans leur cartable, à côté du notebook, quelques bûches pour la flambée. Plus sérieusement, pensons à la circulation automobile et demandons-nous si l'engorgement du cœur de la ville à cause de la fermeture des voies sur berges de la rive droite ne serait pas pour un petit quelque chose dans tout cela. Rappelons-nous : on a assené que l'on voulait assainir la capitale ; en réalité, on a contribué à en dégrader un peu plus l'atmosphère. Et, maintenant, on a beau jeu de braquer un index accusateur en direction des véhicules de ceux qui ne peuvent se déplacer autrement qu'en voiture. Mais non, il n'y a aucun calcul politique dans tout cela. Et puis, le Parisien a encore le droit de tousser. C'est déjà ça.

 


07/12/2016
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